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Sunday 11 February, 2007

Bouddhisme et Islam: histoire d'une cohabitation vieille de 600 ans

La coexistence au Ladakh des traditions bouddhiques et islamique est loin d’être récente. De nombreux vestiges antiques témoignent toutefois des racines bouddhiques extrêmement anciennes de cette région, et sur une zone s’étendant jusqu’aux provinces cachemiries, pakistanaises et afghanes aujourd’hui intégralement musulmanes.

Le Ladakh comme le Tibet, avant que le Bouddhisme n’y pénètre par le Cachemire, était dominé par la religion Bön, dont le bouddhisme tibétain, en particulier la secte Nying-ma-pa[1], a conservé de nombreux éléments. C’est aux alentours du 1er siècle après J.-C. que les premières incursions bouddhistes ont lieu au Ladakh, par l’intermédiaire des missionnaires du roi Asoka. Au 8ème siècle, le grand sage bouddhiste Padmasambhava visite le Zanskar et le Ladakh et y introduit le courant Nying-ma-pa. C’est plus tard, entre 1010 et 1400 que les courants Kargyu-pa (Drug-pa et Drigung-pa), Saskya-pa et Gelug-pa, les plus répandus dans la région aujourd’hui, s’y développent.[2]
C’est également durant cette période que Lotsava Rinchen Zangpo, grand érudit tibétain, traducteur et missionnaire bouddhiste, visite la région et y construit de nombreux chorten et gompa[3], dont celui d’Alchi.
Au huitième siècle, les affrontements entre les armées musulmanes et les Tibétains, dans la région de Gilgit et au Turkestan chinois (Xinjiang), marquent les premiers contacts entre le Ladakh et l’islam.
C’est toutefois vers 1394 que l’islam entre à proprement parler au Ladakh, par l’intermédiaire du grand missionnaire persan et Saint soufi Mir Seyed Ali Hamadani, qui traverse le Ladakh sur sa route vers Kashgar (Xinjiang). Souvent décrit comme le fondateur de la foi islamique au Cachemire, il aurait construit plusieurs mosquées au Ladakh.
Au 15ème siècle, l’un de ses disciples, Seyed Mohammad Noor Baksh, visite le Baltistan et le Purig (région de Kargil) et convertit ces régions. Ses disciples, connus sous le nom de Noorbakshis, forment jusqu’à aujourd’hui un groupe à part, présent uniquement au Baltistan et au Ladakh (vallée de la Nubra). Ce courant à tendance soufie se rapproche davantage du chiisme que du sunnisme, et ses adeptes partagent avec les Chiites certains évènements et cérémonies religieuses.
En 1505, Shams-ud-Din Iraqi, érudit chiite d’origine iraquienne, se rend également dans le Purig et au Baltistan, et y répand encore davantage la doctrine chiite. La région de Leh reste cependant un peu à l’écart des influences islamiques, jusqu’au début du 17ème siècle.[4]

Vers l’an 1600, le roi ladakhi Jamyang Namgyal est fait prisonnier par Ali Sher Khan, gouverneur de Skardu, à la suite d’une défaite militaire. Pour être libéré, il se voit alors contraint d’accepter une alliance avec ce dernier et de lui donner sa fille en mariage. Le vainqueur lui offre également la main de sa propre fille, la Princesse Gyal Khatun, à condition qu’il se convertisse à l’islam et que l’enfant de cette union soit le seul héritier du trône du Ladakh. Cette union entre un roi bouddhiste et une princesse Balti sera la première d’une longue série, qui permettront à l’islam chiite de s’implanter plus durablement au Ladakh et d’y asseoir sa légitimité.
De nombreux serviteurs et servantes Balti, ainsi que des musiciens, suivent la princesse à Leh et s’établissent dans les villages voisins de Shey et de Chushot, sur les rives de l’Indus. Leurs descendants seraient aujourd’hui près de 6000. [5]
Le Roi Jamyang Namgyal fait également venir à la cour sept marchands cachemiris sunnites réputés. Des terres leur sont allouées en retour des services rendus par ces derniers à la cour. La plupart de ces « marchands du Palais » épousent des femmes ladakhies bouddhistes. Leurs descendants vivent encore de nos jours à Leh et dans ses environs.

Pour elle-même et pour sa cour, la princesse Gyal Khatun fait construire des mosquées chiites à Leh et à Shey. Cela n’empêche toutefois pas les Bouddhistes de voir en elle une incarnation de la déesse sGrol-ma (Tara blanche).

Cette période de l’histoire reste jusqu’à aujourd’hui très présente dans l’esprit des Ladakhis, qui s’y réfèrent souvent. Ainsi, un jeune chiite de 26 ans déclare : « Here in Leh, there are lots of mosques, but it’s because of that king, Jamyang Namgyal, who married that Gyal Khatun from Baltistan. He was completely fallen in her love, so he built 3-4 mosques himself, in his time, for Muslims. In Phyang, Chushot area, people are Gyal Khatun’s servants ancestors ».[6]

De cette union royale, que la tradition populaire transforme en une légende romantique, naît celui qui restera dans les mémoires comme le plus grand roi du Ladakh, Sengge Namgyal (« le lion victorieux »). Bouddhiste convaincu, comme son père Jamyang, il lui succède vers 1616, sous la régence de sa mère.[7]

En 1638, le roi Sengge Namgyal doit faire face à une incursion des troupes mogholes de l’Empereur Shah Jahan dans l’ouest du Ladakh. En représailles, il interdit aux marchands cachemiris d’entrer dans la région, mesure qui nuit alors plus au Ladakh qu’au Cachemire…
Sengge Namgyal laisse toutefois son empreinte sur le paysage ladakhi plus que tout autre roi. On lui doit notamment le monastère de Hemis, connu comme étant le plus riche de la région, ainsi que l’imposant palais royal de Leh, édifice de neuf étages surplombant la ville.

A l’ouest de Leh, le grand roi ne parvient toutefois pas à battre les armées musulmanes. Voulant reconquérir des provinces du Purig perdues par son père, il se heurte aux troupes mogholes et balties à Bodh Kharbu et perd la bataille. Son fils, Deldan Namgyal, subit les conséquences de cette défaite en 1663, à l’occasion de la visite de l’Empereur Aurangzeb au Cachemire. Sengge Namgyal n’ayant jamais versé à ce dernier le tribut qu’il s’était engagé à payer, son fils doit à nouveau prêter allégeance à l’Empereur. Il s’engage en outre à construire une mosquée sunnite à Leh, à œuvrer pour la propagation de l’islam au Ladakh et à ce que la khutba[8] y soit récitée. La grande mosquée sunnite de Leh, Jama Masjid, est édifiée environ trois ans plus tard, au centre du bazaar.

En 1670, le roi Deldan voit ses relations avec le Tibet voisin se détériorer. Il prend en effet l’initiative d’afficher son soutien à l’égard du royaume du Bhutan, d’orientation Drug-pa, dans un conflit qui oppose ce royaume au Tibet Ge-lugs-pa, et envoie une missive au 5ème Dalaï- lama, alors à la tête de cet ordre réformé. Ce dernier réagit en envoyant une partie de ses troupes vers le Ladakh.
L’armée tibétaine ne dépasse pas 5000 hommes, mais les projets de construction extravagants de Sengge Namgyal, l’argent dépensé dans l’envoi de missionnaires au Tibet et sa décision de stopper les échanges commerciaux avec le Cachemire ont énormément affaibli l’économie locale.
Devant les Tibétains, l’armée du roi Deldan n’a pas d’autre issue que de se retrancher dans la forteresse de Basgo, à une quarantaine de kilomètre à l’ouest de Leh. Après trois ans de résistance, les Ladakhis finissent par demander son soutien à l’armée du Cachemire, afin de repousser leurs adversaires.
Les Cachemiris n’acceptent cependant de se retirer de la région qu’à la condition que les Ladakhis leurs paient un lourd tribut. Ils se voient notamment contraints d’accorder aux Moghols l’exclusivité dans l’achat de pashm, et sur toute la production du Tibet occidental et du Ladakh. Le roi Deldan est en outre obligé de se convertir à l’islam, et prend le nom d’Aqibat Mahmud Khan. L’un de ses fils est par ailleurs envoyé au Cachemire pour y recevoir une éducation islamique, loin des influences bouddhistes.

La tentative des Moghols de faire du Ladakh une terre islamique, dirigée par une dynastie musulmane se révèle cependant être un échec. L’adhésion de Deldan à sa nouvelle religion ne dépasse pas le stade de la déclaration formelle, et bien que l’islam progresse à l’ouest, la grande majorité des habitants de la vallée de l’Indus restent des Bouddhistes convaincus.

De leur côté, les Tibétains sont consterné d’apprendre la conversion du roi du Ladakh à l’islam. En 1684, ils envoient un émissaire au Ladakh, qui rencontre le roi dans son palais de Timosgang, afin de lui imposer des conditions qu’il n’est pas en position de refuser. Le Traité de Timosgang fixe les frontières actuelles entre le Tibet et le Ladakh, qui perd ainsi la province de Nyima-Gon, reconquise par Sengge Namgyal une cinquantaire d’années plus tôt.

Depuis la fin du 17ème siècle, du fait de la mainmise Cachemirie sur sa politique, le Ladakh ne jouit plus d’une réelle indépendance. La région devient une sorte de territoire tampon entre les terres musulmanes et le Tibet bouddhiste, dont il se devait d’empêcher l’entrée à toute armée indienne, selon un accord.[9]

Le roi Jamyang Namgyal, qui vers 1600, s’était marié à la princesse baltie Gyal Khatun, ne fut pas le seul à devoir se convertir à l’islam et à épouser une femme musulmane. Environ un siècle plus tard, le roi Nyima Namgyal épouse à des fins stratégiques la petite-fille du gouverneur de Khapalu (Baltistan), Zizi Khatun, et par la suite, de nombreux souverains ladakhis épousent également des femmes musulmanes du Purig (région de Kargil).[10] Notons que ces épouses musulmanes appartenaient toutes à la communauté chiite.

Les Ladakhis font le plus souvent référence à ce lointain passé en des termes très positifs. Les erreurs stratégiques du roi Sengge Namgyal sont généralement passées sous silence, ou excusées (« tous les grands hommes politiques font des erreurs ! »), et les nombreuses unions entre rois ladakhis et princesses chiites sont avancées comme des preuve de l’entente légendaire entre ces deux communautés.

Du 17ème au 20ème siècle, les relations du Ladakh avec le Cachemire ne s’améliorent pas. Après l’indépendance, la région, qui était sous les ordres du Maharaja dogra Hari Singh, est remise à l’Etat du Cachemire, alors dirigé par le Sheikh Abdullah et son administration très centralisée.
Dans les années ’60, les velléités indépendantistes bouddhistes commencent à se faire sentir, et l’on assiste aux premières émeutes intercommunautaires dans le district de Leh.

Malgré ce passé tumultueux, la majorité des Ladakhis se souvient de l’avant 1989, année où éclatent les troubles intercommunautaires les plus graves, comme d’un passé plutôt paisible, où la fraternité prévalait sur les différences religieuses.
Contre les guerres avec les provinces du Cachemire et du Tibet voisins, tous les Ladakhis, étaient unis ; les Musulmans ladakhis, majoritairement chiites, ne s’identifiant pas plus aux Cachemiris que les Bouddhistes. Les relations entre les deux communautés étaient certainement beaucoup plus harmonieuses que ce n’est le cas aujourd’hui, et les mariages intercommunautaires étaient courants.

Opposant les Ladakhis entre eux, l’agitation de 1989 marquera un tournant décisif dans les relations entre les communautés chiites, sunnites et bouddhistes.


[1] Le Nying-ma-pa (« l’ancien courant ») est l’ordre monastique le plus ancien du bouddhisme tibétain. Basé notamment sur les enseignements du grand sage Padmasambhava, il met l’emphase sur la méditation solitaire et les pratiques tantriques. Au Ladakh, le seul monastère Nying-ma-pa est celui de Tak-Thog, construit autour d’une grotte où Padmasambhava aurait séjourné.
[2] cf. Gyaltsen Jamyang, The introduction of Buddhism in Ladakh, in: Osmaton Henry, Tsering Nawang (éd.), Recent research on Ladakh 6, p. 117-119.
[3] Rinchen Zangpo aurait construit 108 gompa et autant de chorten du Mont Kailash au col du Zoji-La (à l’ouest de Kargil), (cf. Thsangspa Tashi Ldawa, Ladakh Book of Records : a general knowledge book about Ladakh, p. 4.). Les chorten sont des structures religieuses bouddhistes généralement construites à l’entrée des villages et des gompa, et devant être contournées dans le sens des aiguilles d’une montre.
[4] cf. Ghani Sheikh Abdul, A Brief History of Muslims in Ladakh, in: Osmaton Henry, Denwood Philip (éd.), Recent Research on Ladakh 4&5: Proceedings of the Fourth and Fifth International Colloquia on Ladakh, p. 189-190.
[5] cf. Ghani Sheikh Abdul, A Brief History of Muslims in Ladakh, in: Osmaton Henry, Denwood Philip (éd.), Recent Research on Ladakh 4&5: Proceedings of the Fourth and Fifth International Colloquia on Ladakh, p. 189-190.
[7] cf. Rizvi Janet, Ladakh : Crossroads of High Asia, p. 67.
[8] Khutba signifie « prône » et consiste en une allocution de nature politique avant la prière du vendredi, affirmant la hiérarchie légitime des gouvernants (ici, les empereurs Moghols).
[9] cf. Rizvi Janet, Ladakh : Crossroads of High Asia, p. 70-74
[10] cf. Dollfus Pascale, Ethnohistoire des Musulmans du Ladakh Central, in : , in: Osmaton Henry, Denwood Philip (éd.), Recent Research on Ladakh 4&5: Proceedings of the Fourth and Fifth International Colloquia on Ladakh, p. 296-297.

6 comments:

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